Cet outil permet de définir fonctionnellement un besoin, un objectif ou encore un cahier des charges.
Vers 1945, dans une entreprise américaine, Laurence D.Miles
se vit donner comme ultimatum une réduction très importante des
coûts d'un produit. Une simple amélioration des moyens de
production ne pouvant suffire, il eut l'idée d'analyser le
besoin que satisfaisait ce produit, ce qui l'entraîna à revoir
la conception même du produit. Sa réussite démontra que son
approche fonctionnelle était bonne : l'Analyse de la Valeur
était née.
En France, c'est vers 1970 que les premiers cabinets conseils
développèrent des méthodes fondées sur l'"analyse de la
valeur". Depuis dix ans, l'Association Française de
l'Analyse de la Valeur (AFAV) formalise la démarche et établit
des normes. En 1990, on peut dire que l'A.V. a fait ses preuves
dans le domaine de la conception où elle est devenue un outil
très apprécié.
Parallèlement, Stafford Beer a montré dans les années
soixante, la possibilité d'appliquer la démarche systémique
aux problèmes industriels. Cette nouvelle approche a mis en
évidence la nécessité de rechercher le besoin auquel répond
le système étudié et l'importance de l'analyse de ses
fonctions.
Attention : Ce chapitre vous propose un outil à la fois issue
de l'approche systémique et de la démarche analyse de la
valeur. Il ne s'agit en aucun cas d'un exposé complet sur
l'analyse de la valeur.
Cet outil peut s'appliquer à tous les domaines de la production.
Etant donné le temps qu'il faut pour mener à bien une analyse
du besoin, il est préférable de l'utiliser quand les
investissements en jeu sont importants. Voici l'allure des
courbes d'investissement d'un projet, l'informatisation de la
gestion d'un atelier par exemple :
On remarque que si l'argent n'est réellement dépensé que
vers la fin du projet, il est déjà "investi" dès son
début. En effet, le simple fait d'avoir l'idée d'informatiser
la gestion de l'atelier engage déjà potentiellement une somme
importante. C'est donc au départ qu'il faut faire l'analyse du
besoin. Après, il est trop tard pour réellement revoir le
projet afin d'en réduire le coût dans des proportions valables.
La principale contrainte d'utilisation est l'environnement dans
lequel va se faire le travail : il faut que les hommes,
dirigeants et ouvriers, s'engagent dans l'action, afin que les
résultats puissent être appliqués. Cela acquis, il faut former
un groupe de travail pluridisciplinaire qui sera dirigé par un
animateur, connaissant bien l'outil et si possible indépendant
de l'entreprise, ou du moins, du service. En effet, en analyse de
la valeur, le travail en groupe est obligatoire et il est hors de
question de faire "son" action AV tout seul dans son
bureau.
|
Comme cette méthodologie nécessite :
Ceci en fait un outil particulier puisque les résultats
obtenus dans les exemples ne sont pas directement donnés par la
méthodologie, mais par le groupe grâce à l'animateur et donc
grâce à la méthodologie. En outre, de par la démarche, les
résultats intermédiaires (étapes 1 à 5) ne peuvent être
qu'approchés, seul le résultat final (étape 6) est
"exact".
La façon dont l'animateur applique la démarche étant aussi
importante que la démarche elle-même, afin que le lecteur non
initié à l'animation de groupe comprenne mieux la difficulté
d'obtenir des choses simples, voici un dialogue type entre
l'animateur et le groupe :
Ce dialogue doit exister, même si l'animateur connaît le sujet de l'étude. Il doit en effet toujours rester neutre.
Une société de sous-traitance en mécanique générale veut
informatiser la gestion de son carnet de commandes et son suivi
d'atelier . Le gérant peut y consacrer trois cent mille francs.
L'entreprise travaille à 80% pour des prototypes automobiles et
à 20% pour des prototypes aéronautiques. L'ensemble représente
plus de 600 commandes par an. Une rapide prospection montre que
les "GPAO MRP" (voir page 181 et 353) classiques ne
permettent pas de travailler à la commande ou celles qui le
permettent sont beaucoup trop chères. Le gérant décide donc de
mener une étude préalable, afin de définir le cahier des
charges de cette informatisation. Cette étude sera menée sous
la conduite d'un intervenant extérieur connaissant la démarche
AV et qui animera un petit groupe de travail représentant tous
les services de l'entreprise.
Nous noterons "GPAO" (Gestion de Production Assistée
par Ordinateur) l'objet de l'étude.
Etape 1: Exprimer le besoin¶
Comme le rappelle la systémique, un système n'existe que pour répondre à un besoin, un but, une cause première. La perception et la formalisation de cette utilité globale constitue la première étape de notre méthodologie. La chek-liste de questions ci-dessous va permettre au groupe de mieux exprimer le besoin. Elle est issue de la démarche qualité avec notamment la notion de client et de fournisseur et inclue le doute initial de la méthode de Descartes par la question Pourquoi (d) ?
Recherche du besoin
|
Les réponses à ces questions sont obtenues par une
discussion au sein du groupe de travail. L'animateur inscrit les
résultats au fur et à mesure sur un tableau visible de tous et
non effaçable. Il aide également à relancer la réflexion en
reformulant les idées émises.
Voici le compte rendu que l'on obtient pour notre exemple avec,
entre parenthèses, le repère de la question traitée:
La GPAO doit rendre service aux agents du bureau des méthodes
(a), qui, sur la base des temps d'usinage des pièces (b),
doivent établir des DEVIS (c). Elle doit également rendre
service au chef d'atelier (a) et au PDG (a) qui désirent
connaître les charges horaires (c).
Dès le début de l'étude, on s'aperçoit qu'il y a deux besoins
différents, celui du Bdm qui veut établir des devis, et celui
du PDG (ou du chef d'atelier) qui désire connaître la charge
des machines.
Afin de ne pas charger l'exposé, nous centrerons notre exemple
sur le besoin en devis.
Le besoin est donc validé, et l'étude peut se poursuivre.
Etape 2 : Répertorier les milieux extérieurs¶
Ce sont les fonctions du système qui lui permettent de s'adapter au milieu environnant. La connaissance de celui-ci constitue la deuxième étape. Après réflexion et discussion du groupe, les éléments retenus sont les suivant :
Dans notre cas, un des milieux est le bureau des méthodes (puisque nous étudions le besoin en devis) et les autres milieux sont choisis par analogie avec les fichiers classiques en informatique (MRP notamment).
Etape 3: Rechercher les fonctions
Les milieux extérieurs étant identifiés, le groupe essaie
de définir les fonctions, les services que doit assurer la GPAO.
On symbolise chaque fonction par une ligne qui relie les milieux
concernés. Au fur et à mesure, l'animateur trace les fonctions
au tableau et y porte un repère. La représentation graphique
adoptée ci-dessus (la rosace) est celle recommandée par la
norme X50-153 au paragraphe 5.2.2.1.
En parallèle, l'animateur établit la liste des définitions. A
cette fin, il est conseillé d'utiliser la structure de phrase
suivante :
Définition d'une fonction principale L'[objet de l'étude] DOIT PERMETTRE AU [premier milieu extérieur] DE [verbe d'action] [deuxième milieu extérieur]. |
A cette étape, il ne faut surtout pas s'attarder à obtenir
une définition rigoureuse de chaque fonction, c'est à l'étape
5 seulement qu'elle sera établie.
Voici les définitions initiales du groupe :
F1: La GPAO doit permettre au Bdm de valoriser la gamme
F2: La GPAO doit permettre au Bdm de retrouver une gamme
F3: La GPAO doit permettre au Bdm de connaître le suivi d'une commande
F4: La GPAO doit permettre au Bdm de faire éclater les nomenclatures (OA*)
F5: La GPAO doit permettre au Bdm de connaître le niveau des stocks (OA*)
F6: La GPAO doit permettre au Bdm d'évaluer les charges des commandes
*Pour la suite de l'exposé, on notera OA l'ordre d'approvisionnement et OF l'ordre de fabrication.
Etape 4: Dissocier les différentes séquences
Dans un problème complet, le nombre des fonctions peut
augmenter très rapidement et le graphe devient vite un amas de
traits illisibles. Avant d'aller plus loin dans la démarche, il
faut donc clarifier le problème et, pour cela, le décomposer en
séquences d'utilisation. Ainsi aurons-nous une suite de graphes
plus simples à appréhender.
Le groupe connaissant parfaitement les différentes tâches de
son travail (tous les services de l'entreprise étant
représentés), la décomposition en séquences se fait
rapidement.
On peut remarquer qu'en n'abordant que la phase devis du Bdm, nous avons traité une des séquences sans le vouloir : la première.
Il y a généralement deux séquences qui sont oubliées, d'une part, celle de maintenance (IV) et d'autre part, celle d'extinction (V) :
Ces deux dernières séquences ne rendent pas service à une personne particulière, dans l'entreprise de notre exemple, mais sont vitales pour le bon fonctionnement. On dit alors qu'elles génèrent des contraintes. Le groupe découvre trois contraintes découlant des séquences IV et V :
F12 : La GPAO doit pouvoir fonctionner en régime
dégradé (micro pannes)
F13 : La GPAO doit assurer la sécurité des données
F14 : La GPAO doit pouvoir communiquer ses données à un
autre système
Le graphe complet comporte quatorze fonctions qui peuvent être décomposées en cinq séquences . La recherche des séquences amène donc une simplification, tout en aidant à structurer le problème. Il peut sembler préférable d'intervertir l'étape 3 : "rechercher les fonctions" et l'étape 4 : "dissocier les différentes séquences", afin de clarifier dès le départ le problème. Ce serait méconnaître la nature humaine dont le potentiel créatif est rapidement réduit à zéro si on lui impose des limites : ici une structure en séquences. L'animateur doit donc ne faire intervenir cette étape 4 que lorsque le groupe est essoufflé dans la recherche des fonctions.
Etape 5 : Valider et définir les fonctions
C'est Descartes, qui le premier formalisa cette notion de validation et en a fait le premier point de sa méthode : " ne recevoir jamais aucune chose pour vraie ... ". La question type que nous utiliserons est le fameux "POUR QUOI ... oui et POURQUOI ... ?" des psychologues. Il est possible qu'au cours de cette étape, des fonctions soient éliminées, certaines modifiées, et d'autres découvertes. Finalement on peut dire que c'est à ce moment-là que le groupe va prendre conscience du "vrai" besoin.
Voici le questionnaire de base pour la validation :
Contrôle de validité des fonctions Pour chaque fonction :
|
C'est donc une démarche centrée systématiquement sur les fonctions. Si le groupe n'est pas composé que de spécialistes, son travail sera très efficace; en effet, les personnes qui sont totalement plongées dans "leur" fonction ont beaucoup de mal à sentir et à admettre l'inutilité de celle-ci. Aussi le savoir-faire de l'animateur joue-t-il ici un rôle décisif.
FONCTION F1
L'animateur applique cette liste de questions pour F1 et obtient
:
Toutes ces réponses -du groupe- sont ensuite regroupées dans un compte rendu que rédige l'animateur après la séance :
La méthode consiste à donner le maximum de renseignements
sur le verbe d'action et les milieux extérieurs, de façon à
lever toutes les ambiguïtés et à formuler tous les non-dit de
la définition initiale.
Si le groupe en éprouve le besoin, il est possible de compléter
ou de modifier le libellé de la fonction : on obtient alors le
libellé validé. Toutefois, il faut se souvenir qu'une personne
extérieure au groupe de travail désirant connaître les
fonctions, ne devra jamais se contenter du libellé, mais devra
lire également les définitions, afin de bien cerner le
contexte.
FONCTION F2
Continuons maintenant avec le compte rendu du travail sur la
fonction F2 :
Cette fonction est particulièrement intéressante parce qu'elle va faire découvrir de nouvelles fonctions de contraintes. En effet, on remarque qu'il faut pouvoir retrouver une gamme de trois manières différentes. Le Bdm ne veut surtout pas recoder les commandes, les plans et les pièces, il désire garder la codification du client. Voici les trois fonctions de contraintes découvertes à cette étape :
F15: La GPAO doit permettre l'utilisation des numéros de
commande client
F16: La GPAO doit permettre l'utilisation des numéros de plan
client
F17: La GPAO doit permettre l'utilisation de noms de famille pour
les pièces
AUTRES FONCTIONS
Ce travail systématique se poursuit pour toutes les fonctions, y
compris les fonctions de contraintes que le groupe a ajoutées.
Etape 6 : Caractériser et hiérarchiser les fonctions
CARACTERISER
Il faut maintenant donner des critères d'appréciation (ou
critères de valeur) à chaque fonction, afin de pouvoir définir
si la GPAO satisfera ou non le besoin. A cette étape, c'est
souvent l'utilisateur de la fonction qui prend la parole pour
présenter ses critères. L'animateur doit alors encourager le
groupe à "vérifier", à valider ces données de base,
tout en veillant à ce que la discussion ne tourne pas en débat
de spécialistes. Il faut insister sur le fait que l'on a défini
des fonctions et non des solutions.
Avant de donner des exemples de comptes rendus de
caractérisation, rappelons les définitions normalisées des
termes employés:
Norme X 50-150 Critère d'appréciation : Niveau d'un critère d'appréciation : Flexibilité : |
"La flexibilité est une des caractéristiques
fondamentales du cahier des charges fonctionnel. C'est elle qui
permet d'organiser le dialogue entre partenaires dans la
recherche d'une véritable optimisation. ...(Elle) peut
s'exprimer quantitativement sous forme de limites d'acceptation
et de taux d'échange, ou au moins qualitativement par des
classes de latitude autorisée." (extrait de la norme
indiquée ci-dessus).
Ainsi pour F1 (la GPAO doit permettre au Bdm de valoriser la
gamme prévue ou réelle), l'animateur obtient
Il est possible d'avoir plusieurs critères pour une même fonction, comme nous allons le voir pour F2 (la GPAO doit permettre au Bdm de retrouver une gamme).
Critère 2: Temps
d'accès à la gamme
Niveau: 15 minutes
Flexibilité: 1 heure au maximum, si elle est dans
les archives
Critère 3: Nombre de manipulations
Niveau: le minimum sur l'exercice en cours (les 60
derniers jours)
Flexibilité: fonction de l'ergonomie de la GPAO
De la même façon, il faut définir les autres fonctions, en ayant bien à l'esprit qu'il s'agit des critères qui permettront de tester la GPAO. Pour les contraintes :
HIERARCHISER
La caractérisation étant finie, le groupe connaît les
fonctions principales d'une façon très pointue, et l'animateur
en profite pour demander aux participants de les hiérarchiser
suivant leur importance budgétaire.
Il faut d'abord classer les fonctions avec l'outil "Méthode
des Potentiels" par exemple (voir page 121), puis leur
donner une valeur relative par consensus du groupe. La
hiérarchie obtenue pour l'exemple est :
F1, F2, F3, F6, F7, F8&F9, F4, F5&F11, F10
L'animateur utilise ensuite une représentation graphique (les barres par exemple), pour visualiser l'importance relative des fonctions :
L'animateur doit insister sur le fait que ce travail
doit se faire en fonction de toutes les étapes précédentes et
non en fonction d'aspirations personnelles. Quand la
représentation du tableau convient au groupe, on mesure la
hauteur de chaque colonne qui est proportionnelle à la valeur de
la fonction. Il est ainsi possible de ramener cette valeur au
coût prévisible de la GPAO.
Voici le tableau des résultats déduits de notre graphique. On
retrouve le repère de la fonction , puis la hauteur (en
centimètres) relevée sur le tableau, le pourcentage de chaque
fonction par rapport à la somme des fonctions, et enfin la
valeur ramenée aux 100 KF (valeur moyenne du marché en 1988) du
coût du logiciel (1/3 du coût total de la GPAO).
Fct |
Hauteur en cm |
% |
Valeur
"logiciel" |
F1 |
52 |
18 |
18 KF |
F2 |
46 |
16 |
16 KF |
F3 |
41 |
14 |
14 KF |
F6 |
29 |
10 |
10 KF |
F7 |
25 |
9 |
9 KF |
F8 |
20 |
7 |
7 KF |
F9 |
20 |
7 |
7 KF |
F4 |
18 |
6 |
6 KF |
F5 |
15 |
5 |
5 KF |
F11 |
15 |
5 |
5 KF |
F10 |
9 |
3 |
3 KF |
- |
- |
S |
100 KF |
Le groupe est arrivé au terme de son étude. Nous avons maintenant en notre possession un cahier des charges complet :
Il ne reste plus qu'à lancer un appel d'offre et analyser les
réponses. En 1988, la majorité des petites GPAO ne satisfont
pas aux fonctions comme :
F2 : la GPAO doit permettre au Bdm de retrouver une gamme (sur 10
ans d'archives),
F14 : la GPAO doit pouvoir communiquer ses données à un autre
système,
F15 : la GPAO doit permettre l'utilisation des numéros de
commande client; et elles sont à la limite d'acceptation pour :
F3 : la GPAO doit permettre au Bdm de connaître le suivi d'une
commande
Quelques GPAO ont satisfait au cahier des charges et une visite sur site a permis de les départager. Les quelques dizaines d'heures passées à cette analyse sont donc plus que rentabilisées par rapport aux 300 KF d'investissement initial et, surtout, par rapport aux déboires essuyés dans le cas d'achat d'une GPAO mal ciblée.
Une entreprise désire analyser l'organisation des postes de
production, afin d'augmenter les temps productifs. Le gérant
demande à un intervenant extérieur spécialiste de l'A.V.
d'animer le groupe de travail.
Nous noterons "OST du poste" l'objet de l'étude ( pour
Organisation Scientifique du Travail du poste).
Ce deuxième exemple est axé sur l'analyse d'un processus. La
méthodologie ayant été complètement décrite pour le premier
exemple, nous resterons au niveau de la démarche et ne donnerons
que des extraits des résultats. Nous rappelons au lecteur qu'une
analyse du besoin doit se faire avec un groupe de personnes. Dans
l'exposé, il ne faut donc jamais confondre la méthodologie et
les résultats qu'elle a permis d'obtenir sur un thème
particulier et avec un groupe donné.
Etape 1 : Exprimer le besoin
L'animateur, par le jeu des questions relatives à la
recherche du besoin, permet au groupe pluridisciplinaire de
définir le besoin et de le valider. A la suite de la réunion de
travail, l'animateur rédige un compte rendu qu'il fait parvenir
à tous les membres du groupe, afin qu'ils puissent y réfléchir
pour la réunion suivante.
Voici donc ce compte rendu avec en entête, le repère de la
question traitée (voir encadré "Recherche du besoin")
:
Le besoin étant stable dans le temps, il est donc validé.
Etape 2 : Répertorier les milieux extérieurs
Le groupe obtient la liste complète des milieux en analysant à qui l'OST du poste rend service et sur quoi (sur qui) elle agit:
Etape 3 : Rechercher les fonctions
Avant de tracer la rosace, l'animateur va symboliser, sous forme de graphique, les milieux extérieurs que le groupe analysera, afin de déterminer les fonctions. Elles seront repérées sur le graphique, tandis qu'en parallèle seront également notées les définitions données par le groupe. Voici un extrait des fonctions relatives à notre exemple :
L'OST du poste doit permettre :
On peut remarquer qu'il est possible que certaines fonctions
relient plus de deux milieux extérieurs (F5 par exemple). Ceci
est tout à fait admis.
Le nombre de fonctions étant très élevé, près de quarante en
tout, il est intéressant de découper l'étude, de la
hiérarchiser, en mettant en avant les différentes séquences
d'utilisation.
Etape 4 : Dissocier les différentes séquences
L'analyse des séquences ou cycles de vie se fait
généralement très facilement, puisque le groupe a déjà
travaillé plusieurs heures sur l'analyse du besoin. Cette étape
permet de mettre de l'ordre, de structurer le fruit de l'étude.
L'animateur doit donc veiller à ce que le groupe n'entre pas
trop dans les détails, il ne s'agit pas de disséquer, mais de
synthétiser.
Les différentes séquences définies par le groupe de travail
pour un poste de production sont :
La suite de l'étude va donc pouvoir être étalée dans le temps, en petites séances au cours desquelles on analysera une ou deux séquences. Arrivé à ce stade, il est souhaitable que chaque participant reparte avec une séquence à préparer.
Etape 5 :Valider et définir les fonctions
VALIDER
Le contrôle de validité s'effectue comme nous l'avons vu au
premier exemple. Prenons la fonction F5 de la séquence I. (l'OST
du poste doit permettre au régleur de positionner l'outil par
rapport au montage et à la pièce) :
Nous pouvons remarquer que la pièce est citée en réponse à
la question a et ne l'est plus pour la question b. Après
recherche d'informations et discussion avec un régleur, il
s'avère que la pièce n'a pas besoin d'être présente sur le
poste pour la séquence de réglage et ce, même pour les
processus d'usinage (contrairement aux habitudes du personnel
d'atelier). Donc la fonction n'est pas validée.
Il suffit de supprimer le mot pièce pour obtenir la nouvelle
fonction : F5': l'OST du poste doit permettre au régleur de
positionner l'outil par rapport au montage.
L'OST du poste doit permettre au régleur de positionner l'outil par rapport au montage pour obtenir des pièces bonnes (a), car l'outil peut être décalé par rapport au montage (b). Ce réglage peut prendre beaucoup de temps et dépend du précédent (c). Il semble impossible de le supprimer, aussi la fonction est-elle validée.
DEFINIR
Ce travail systématique doit se faire sur toutes les fonctions de toutes les séquences. Afin de ne pas émousser le sens critique du groupe, les séances de travail doivent être suffisamment courtes et espacées (2, 3, ou 4 séances de 3 ou 4h par semaine par exemple).
Etape 6 : Caractériser et hiérarchiser les fonctions
CARACTERISER
Dans une analyse du besoin "Process", la
caractérisation est plus facile, plus standard. En effet,
plutôt que de rechercher les critères d'appréciation de chaque
fonction, comme nous l'avons fait dans le premier exemple, nous
utiliserons toujours le même "état". On en distingue
deux types :
AV Process : On caractérise une fonction, une séquence par son état: stable ou fugace
Les définitions du niveau et de la flexibilité deviennent inutiles, puisque l'état stable a déjà été caractérisé par un cahier des charges (la gamme du processus de la pièce dans notre cas) et que l'état fugace est par essence "inutile". La caractérisation consiste donc, pour chaque séquence, à établir la liste des fonctions avec, en regard, son état (comme on le fait également en "Analyse de déroulement", voir page 75).
Le groupe obtient :
Séquence |
Repère de la fonction |
Etat |
I.
Réglage |
F5 |
Fugace |
III. Montage |
F17 |
Fugace |
IV. Processus |
F1 |
Stable |
V. Démontage |
F10 |
Fugace |
VI.
Contrôle |
F11 |
Fugace |
La lecture de ce tableau appelle plusieurs remarques :
HIERARCHISER
Au vu du tableau précédent, il serait inefficace de
hiérarchiser, puis de valoriser les fonctions sur le critère de
l'"état". La solution consiste à analyser globalement
les fonctions au travers des séquences, dans un premier temps,
puis de "faire la chasse" aux états fugaces.
AV Process : Le but de la hiérarchisation est de
"faire la chasse" aux "états fugaces", en
fonction de leur coût relatif et de leur potentiel de
réduction.
Pour déterminer l'importance budgétaire de chaque séquence, le
groupe doit calculer la "valeur", le coût de chacune
d'elle. Il l'obtient en multipliant le temps par la fréquence et
par le taux horaire :
AV Process : Valeur = Temps ´ Fréquence ´ Taux
Cette démarche peut être synthétisée sous la forme d'un tableau qui permettra à l'animateur de dessiner le graphe des séquences hiérarchisées suivant un critère budgétaire :
Repère |
Désignation |
Temps en minutes | Fréquence par jour | Taux en F/min | Valeur en F |
I | Réglage | 60 | 1 | 8 | 480 |
II | Transit | 5 | 8 | 2 | 80 |
III | Montage | 0.2 | 1 000 | 8 | 1 600 |
IV | Processus | 1.5 | 1 000 | 8 | 12 000 |
V | Démontage | 0.2 | 1 000 | 8 | 1 600 |
VI | Contrôle | 0.5 | 1 00 | 4 | 200 |
VII | Maintenance | 180 | 0.1 | 8 | 144 |
VIII | Extinction | 30 | 1 | 8 | 240 |
C'est donc la séquence "IV.Processus" qui est la plus importante avec près de 75% de la valeur (ce qui est souvent le cas pour les entreprises dont la production s'exprime en milliers de pièces par jour). Les autres séquences (entièrement fugaces) se répartissent de la façon suivante :
L'analyse du besoin est terminée. Le groupe a déterminé les
séquences d'utilisation du poste où l'argent était
potentiellement à gagner. La séquence "stable" IV
(Processus) a le coût le plus important, mais pour le réduire,
il faut généralement faire une analyse de la valeur de
l'article (AV conception).
Quant aux séquences fugaces III, V, et I, diminuer leurs coûts
est possible en réduisant leur temps, mais, surtout en changeant
leur taux horaire. L'idée principale est de déplacer hors site
les séquences fugaces (à 4F/min ou 2F/min) et de ne garder sur
site (8F/min) que le minimum. La recherche des solutions ne
faisant pas partie de l'analyse du besoin, nous conseillons au
lecteur intéressé par celles-ci de se reporter aux ouvrages
traitant du SMED (Single Minute Edge Digit ou changement de
série en moins de dix minutes) référencés en fin de chapitre
et aux clefs page 293.
Avant de conclure, nous pouvons remarquer, à posteriori, que le
choix de : "OST du poste" pour désigner l'objet de
l'étude était peut-être trop axé sur les
"SOLUTIONS" et pas assez sur les "FONCTIONS".
Pour cette raison, de nombreux animateurs préfèrent utiliser le
mot "TRUC" comme terme générique.
L'étude de ces deux exemples nous a montré que l'analyse du
besoin en terme de fonctionnalité était un outil très
général qui nécessitait à la fois un groupe motivé et un
animateur. Ce dernier joue un rôle important et doit connaître
convenablement l'outil; pour les autres membres du groupe, une
simple sensibilisation suffit.
Tout au début du chapitre, nous vous proposions un graphe
montrant l'évolution des investissements tout au long d'un
projet. Voici comment l'utilisation de l'outil "Analyse du
besoin" fait évoluer les courbes :
Comme l'action "analyse du besoin" nécessite des
dépenses (rémunération de l'animateur et perte de
demi-journées de travail pour les personnes constituant le
groupe), le début du projet coûte beaucoup plus cher, mais tant
que l'analyse du besoin n'est pas finie, pas un seul centime
n'est potentiellement engagé. Ensuite une différenciation
naturelle se produit du fait que la décision précède l'action.
En analyse du besoin, les gains sont souvent proportionnels aux
enjeux économiques. Ils peuvent être spectaculaires, puisque,
si le besoin n'est pas validé, l'économie est de plus de 90% !
En revanche, le coût de l'étude peut s'avérer trop important
pour de petites sociétés; la solution consiste alors à
partager l'étude (et les frais) avec d'autres entreprises qui
connaissent le même problème. Ainsi les deux exemples que nous
avons traités peuvent-ils facilement être transférés sur
d'autres PMI. Evidemment, dans ce cas précis, l'ambiance doit
être plus au partenariat qu'à la méfiance ...